Jimmy Johnstone, la puce du Celtic.

Il y a eu Sir Stanley Matthews, puis Georges Best et enfin Lionel Messi. Le facteur commun de ces trois grands hommes ? Un nom, une petite taille, des cheveux roux, une histoire qui s’apparente furieusement à un savant mélange de la magie des trois hommes dans le profil. Son nom : Jimmy Johnstone. La « pulga » écossaise était d’une élégance rare balle au pied, semant le trouble dans les défenses adverses comme dans sa vie privée. Il était petit par la taille mais immense par le talent. Retour sur la vie de l’artiste écossais qui marqua de son empreinte la planète foot.

Enfance et premiers pas dans le football

Jimmy Johnstone, surnommé Jinky, est né dans une famille de mineurs le 30 septembre 1944 à Viewpark, une ville du North Lanarkshire. Le jeune écossais vit et grandit près d’Old Edinburgh Road, à dix minutes à pied de sa ville natale. Le jeune Jinky tape dans ses premiers ballons dès le plus jeune âge, dans la rue ou dans les parcs publics. Jimmy joue avec des ballons de tennis et, que ce soit tout seul, avec des enfants de son âge ou avec son grand frère Pat Johnstone (qui s’est avéré être bon footballeur également !), il affine déjà la technique et les gestes qui feront de lui un monstre sur les prés de l’élite écossaise. Le premier à remarquer le talent de Jimmy est un instructeur du nom de John Crines ; ce dernier ayant remarqué l’aisance technique et le talent du jeune Jimmy, il réussit à convaincre les parents de Jimmy d’intégrer la St Columba’s Primary à l’âge de huit ans. Le jeune Jimmy est inscrit à l’école primaire locale, et très vite son talent saute aux yeux de tous ses camarades de jeu et instructeurs.

Jimmy Johnstone ici en primaire posant déjà avec plusieurs trophées, une pratique qui deviendra une habitude pour l’ailier de poche.

Lors de l’année scolaire 1953-1954, alors âgé de dix ans, Jinky est déjà inarrêtable et a déjà soulevé tous les trophées à sa portée. Cette année-là, la star rouquine de l’école primaire remporte la League Cup, le John Lee Trophy et la Country Cup. À l’âge de treize ans, Jimmy assiste depuis le banc à un match de son frère. Pat se blesse et le coach qui n’est autre que Matt Johnstone, le père des deux frères décide à contrecœur de faire entrer son fils, partagé entre la déception de la blessure de son fils et la crainte qu’il arrive la même chose à Jimmy.
Néanmoins, celui-ci s’en tire à merveille et comme un miracle n’arrive jamais seul, il se trouve que ce jour-là, dans la plus grande discrétion, un recruteur du Celtic Glasgow venu observer Pat est présent, tombé sous le charme de Jimmy. Le génie écossais intègre ensuite le St. John the Baptist basé à Uddingston.

Jimmy Johnstone (balle au pied) avec son équipe de football, pensionnaire du St. John the Baptist en 1958

Le jour de sa détection, il est également observé par Manchester United alors entrainé par le légendaire Matt Busby. Cela lui permet par la suite de participer à un voyage scolaire à Manchester, au cours duquel Jimmy va rencontrer son idole : Sir Stanley Matthews, légende absolue du football britannique et premier ballon d’or de l’histoire. Fasciné par son habileté balle au pied dans sa jeunesse, Jinky s’en inspirera par la suite pour mettre à mal les défenses adverses.

Jinky (le garçon roux), ici avec un camarade au centre de formation du Celtic Glasgow

En 1959, à quinze ans, Jinky quitte l’école et commence à travailler sans occulter sa formation de footballeur qui se déroule au Blantyre Celtic FC, un club en partenariat avec le grand Celtic pour y faire pousser des jeunes pousses. Pendant deux ans, Jinky fait ses gammes puis reviens au Celtic en 1961 en équipe réserve. Le 7 octobre 1961, il fait ses débuts avec la réserve dans un match contre St Johnstone remporté quatre buts à deux, et s’offre par la même occasion son premier but. Le 1er juillet 1962, il intègre l’équipe première du Celtic. L’histoire est en marche.

Un lion au zénith de sa carrière

Les débuts en professionnels de Jimmy sont poussifs, de 1962 à 1964, l’ailier peine à confirmer les espoirs placés en lui par le club de Glasgow. L’attaquant droit est alors à l’image de son club : un manque de confiance cruel et des incohérences dans les choix (des hommes et sur le terrain) empêchent le Celtic de franchir le pas. Jusqu’à ce 9 mars 1965 qui coïncide avec l’arrivée de l’homme qui le révèle aux yeux de l’Europe et du monde et qui lui fera atteindre son meilleur niveau : Jock Stein. Malgré le fait que ce dernier soit protestant (le Celtic est un club traditionnellement catholique), il réussit à convaincre les dirigeants du club au trèfle à quatre feuilles de lui laisser sa chance, fait rarissime à noter tant la dimension religieuse en écosse est fondamentale dans le football en club. Sous la houlette du technicien écossais, et du fait de son statut d’ex-joueur du Celtic Glasgow entre 1951 et 1957, il va sublimer l’équipe et faire du fougueux ailier le symbole de ce collectif.

Sans attendre, la mue s’opère et la gloire tend les bras au Celtic. En raison de ses déboulés sur son côté droit de plus en plus tranchants, spectaculaires et pas moins efficaces, ainsi qu’en référence à sa similitude avec son illustre aîné et idole anglaise Sir Stanley Matthews, Jimmy est affectueusement surnommé The Lord of Wing. Le duo Stein-Johnstone signe l’avènement d’un cycle glorieux qui correspondra à l’âge d’or du club. Dès le mois d’octobre 1965, Jimmy s’offre son premier trophée, la League Cup écossaise sur le score de deux buts à un en finale aux dépends du Glasgow Rangers dans un Old Firm des plus électriques au Hampten Park. Jinky se distingue lors de cette partie en tourmentant la défense adverse tout le long de la partie. La fin de saison 1965-1966 sonne le début d’une domination nationale outrancière de la part du Celtic. En mai 1966, le Celtic Glasgow remporte le premier de ses neufs championnats consécutifs en battant Motherwell un but à zéro. La saison aurait pu être plus belle encore mais les coéquipiers de Jinky se font battre par Liverpool en demi-finale retour de Coupe Des Coupes (C2), sur le score deux buts à zéro malgré la victoire au match aller à domicile un but à zéro.

De par sa qualité de passe exceptionnelle, Jimmy Johnstone a fait des coups de pieds arrêtés une de ses spécialités !

Après cette jolie saison, Jimmy Johnstone s’est déjà fait un nom, une image, un style reconnaissable de tous les amateurs de football en Europe et est au sommet de son art. Une petite tête rouquine qui dribble avec une aisance quasi insolente son vis-à-vis, une contribution déterminante sur les buts du Celtic, un véritable destructeur de défenses : le crack de Viewpark régale sur toutes les pelouses qu’il foule cette saison-là. Tout ce qu’il touche se transforme en or et ses ballons travaillés ne laissent que peu de chances aux adversaires du club de Glasgow. Une saison à l’image de son artiste : faite de sommets et sans aucun doute la plus belle de toutes. Sur la scène nationale, le Celtic remporte le championnat le 6 mai 1967 au Ibrox Park, stade du rival honni le Glasgow Rangers. Ce jour-là, Jimmy Johnstone livre un récital et inscrit un doublé salvateur qui permet au Celtic de faire match nul (deux partout score final), suffisant pour soulever le deuxième championnat consécutif. En League cup, l’équipe de la puce du Celtic s’impose sur la plus petite des marges, un but à zéro, toujours face au rival éternel. Enfin en Cup, le Celtic se défait d’Aberdeen en finale au Hampten Park et s’octroie le trophée après une victoire deux buts à zéro grâce à un doublé de Wallace. Mais ce qui fera à jamais la renommée de Johnstone, c’est la campagne européenne du Celtic Glasgow.

L’ailier droit écossais, célébrant son deuxième but contre les Rangers le 6 mai 1967

L’épopée européenne du Celtic démarre à domicile contre le FC Zurich au premier tour. Une victoire nette, deux buts à zéro suivie d’une correction trois à zéro à l’extérieur Deux matchs et deux prestations abouties dans le jeu pour la puce du Celtic et la bande de Jinky se prépare à affronter le FC Nantes au second tour. Lors du match aller au stade Marcel Saupin, Jimmy et ses coéquipiers l’emportent trois buts à un et le génie roux marque le public français. Une masterclass qui lui vaudra le surnom de « puce volante » par ce même public (flying flea en anglais). Au match retour, les Bhoyz infligeront le même résultat qu’au match aller et Jimmy sera, une fois encore, auteur d’une prestation phénoménale. Le 1er mars 1967, les Bhoyz sont en déplacement sur le terrain du FK Vojvodina. Malgré un Johnstone remuant sur son coté, le Celtic perd la manche aller un but à zéro. Mais dans une ambiance irréelle, le Celtic s’imposera au retour deux buts à zéro et validera son ticket pour les demi-finales de la Ligue des Champions (C1) grâce à un Jimmy Johnstone de gala. En demi-finale aller, The Celts affrontent le Dukla Prague. Ce match verra le génie de Viewpark marquer avant d’être imité par deux fois par son coéquipier Wallace pour sceller une victoire trois buts à un avant de le déplacement en République Tchèque. La manche retour se solde par un nul vierge de buts et le Celtic atteint pour la première fois de son histoire la finale de la C1.

Lisbonne, Estádio Nacional, 25 mai 1967. Il est 17h30, le soleil est radieux au moment où le Celtic Glasgow foule la pelouse pour affronter l’Inter Milan d’Helenio Herrera et son catenaccio dans ce qui va devenir la plus grande journée de l’histoire du club. Après une rapide ouverture du score sur penalty dès la septième minute de jeu par l’intermédiaire de son fabuleux numéro 10 Alessandro Mazzola, les intéristes mettent en place leur catenaccio. Une véritable défense à 11, à tel point que durant la partie, l’Inter Milan n’obtient aucun corner. À l’inverse, le Celtic de Johnstone tire pas moins de trente-neuf fois au cours de la partie dont treize tirs arrêtés par le gardien de l’Inter Guiliano Sarti. Nous sommes à la soixante-troisième minute de jeu lorsque Jim Craig, fautif sur le penalty concédé en début de match, adresse une passe décisive pour Tommy Gemmell. Un but partout, l’espoir renaît et les Bhoyz sont revenus dans le coup : vingt minutes après l’égalisation, sur une frappe de Bobby Murdoch détourné par Stevie Chalmers, le Celtic reprend la tête au tableau d’affichage. S’en suivent des minutes interminables pour les écossais, pendant lesquelles la qualité technique de Jimmy Johnstone dans la conservation du ballon fait un bien fou au Celtic.

Les lions de Lisbonne, au soir de la finale de C1 remportée plus tôt dans la journée face à l’Inter Milan

Le coup de sifflet final retentit enfin, l’exploit est retentissant : le Celtic Glasgow devient le premier club britannique (et du nord de l’Europe !) à être sacré champion d’Europe. Une performance XXL à jamais gravée dans les livres d’histoires du football, avec pour symbole un gamin de Viewpark. Bien que son nom ne soit pas sur la liste des buteurs ou des passeurs, l’ailier droit est le grand bonhomme de cette rencontre. Une vista et une classe naturelle qui auront su créer des espaces dans le dos de l’une des défenses les plus imperméables jamais vues et créer des déséquilibres en fin de match, un récital collectif et individuel malgré une entame de match ratée. Tarcisio Burgnich, au marquage de Jimmy Johnstone n’aura jamais autant souffert que ce jour-là face au talent de la puce. Les vainqueurs seront surnommés par la suite les Lions de Lisbonne en hommage à leur victoire épique. À l’issue du match, Jock Stein, coach du Celtic déclarera à la fin du match : « Nous l’avons fait en jouant au football. Un football pur, beau et inventif ». Sandro Mazzola, tout en fair-play et sobriété, déclare quant à lui : « Les joueurs du Celtic étaient des surhommes ». Le Celtic est également le premier club européen à remporter la même saison sa coupe nationale son championnat et la coupe d’europe la même saison, remportant ainsi le premier triplé de l’histoire.

Dans la foulée, le Celtic est invité par le Real Madrid à jouer contre eux dans le cadre du jubilé de la légende Alfredo Di Stéfano. Si certains pensent que le Celtic, fatigué de leur finale européenne se fera battre à plates coutures, ce sont pourtant bien les écossais qui s’imposent un but à zéro sur une réalisation de Bobby Lennox à la soixante-neuvième minute. Dans la lignée de sa finale de C1 monumentale, Jimmy Johnstone va une nouvelle fois impressionner le monde. L’attaquant choisit le lieu et la manière pour éclabousser de toute sa classe et de son talent l’exigent public de Santiago Bernabéu, au point de faire décrocher des « Olé » des tribunes dès qu’il touche le ballon.

Alfredo Di Stéfano (à gauche de l’image en short bleu), ici en action lors de son jubilé contre le Celtic Glasgow

Des dribbles chaloupés, des déséquilibres dans la défense adverse, des passes fantasques, le Lionel Messi écossais réussit une partie fantastique au point d’être la cible de tacles qui n’ont, eux, rien d’amicaux. À noter sa passe décisive qui résume à elle seule qui était Jimmy Johnstone : généreux dans les efforts et pétri de talent, il récupère la balle au milieu de terrain dans son propre camp avant de se lancer dans un rush messiesque. Une remontée de balle, deux joueurs effacés, et un amour de ballon distillé dans l’intervalle, alors qu’il est aux prises avec quatre défenseurs, pour Lennox qui n’a plus qu’à croiser son tir en force dans le petit filet opposé. Ainsi, Jinky se fait connaître et adouber par Alfredo Di Stéfano lui-même (il lui volera même la vedette) qui en dira le plus grand bien par la suite. Andrés Junquera, gardien mythique du Real Madrid et titulaire lors du jubilé de Di Stéfano déclarera plus tard que Jimmy Johnstone est l’adversaire le plus impressionnant qu’il ait eu à affronter.

Quelques mois plus tard, Jinky et le Celtic disputent la Coupe Intercontinentale face à un club argentin qui vit alors également la plus belle année de son histoire, le Racing Club de Avellaneda, vainqueur de la Copa Libertadores (C1 sud-américaine). Le match aller se déroule au Hampten Park et se solde sur une victoire un but à zéro du Celtic sur une réalisation de William McNeil. Le match retour se déroule à l’Estadio Presidente Juan Domingo Perón à Avellaneda. Un match âpre et très disputé, à l’issue duquel le club écossais s’incline deux buts à un malgré l’ouverture du score des Bhoyz. Un match d’appui est alors nécessaire et c’est après un véritable combat de rue que le Racing s’imposera sur la plus petite des marges en Uruguay à l’Estadio Centenario. Cinq cartons rouges, deux coté Racing et trois coté Celtic (dont un pour Johnstone à la quarante-septième minute).
Bien que vainqueur, Roberto Perfumo, un des tous meilleurs défenseurs que l’Argentine ait pu voir dans son histoire déclarera : « Jimmy Johnstone nous a donné une leçon à Glasgow. Pendant 80 minutes j’ai essayé de le contenir, mais il était insaisissable ; il nous a rendu fous. »

Jimmy Johnstone, expulsé lors du match d’appui en finale de coupe intercontinentale en Uruguay

1967 sera l’année de Jimmy et il est, cette année-là, classé troisième au classement du ballon d’or derrière Sir Bobby Charlton, légende de Manchester United et le lauréat Flórián Albert, fabuleux maître à jouer du club hongrois le Ferencváros Torna Club. Et si l’on peut regretter l’élimination précoce du Celtic en C1 dès le premier tour face au Dynamo Kiev, cela n’empêchera pas Jinky et le club de Glasgow de maintenir sa domination nationale avec le Celtic en soulevant le championnat à chaque fin de saison entre 1968 et 1974, remportant également 5 Cup (en 1969, 1971,1972,1974 et 1975) et 2 League cup (1969 et 1975).

Le lion de Viewpark rugit, fait sourire et ravit ses supporters, notamment lors d’un match contre Dundee United remporté sept buts à deux et, bien qu’il ne marque pas, Jinky est sans conteste l’homme du match. Son jeu de corps, ses prises et conservations de balles, son art de la passe, sa manière d’infiltrer la défense adverse en lorgnant sa ligne de touche ou en repiquant à l’intérieur, toute la palette fantaisiste de l’ailier nous est présentée dans ce match. À plusieurs reprises dans ce même match, il dribble cinq ou six joueurs sur la même action, ce qui lui vaudra les plus grands éloges de la presse qui n’en revient toujours pas le lendemain.

Jimmy Johnstone, qui tente une volée lors de la demi-finale de la ligue des champions 1972 Celtic Glasgow-Inter Milan

Dans cette période faste, notre lion de Lisbonne ne se limite pas qu’aux frontières écossaises. Cela s’illustre notamment par ce match contre l’Étoile Rouge de Belgrade en novembre 1968. Ayant une phobie de l’avion, Jinky s’arrange avec son coach Jock Stein : il ne se déplacera pas pour le match retour si le Celtic l’emportait par trois buts d’écarts. Jinky marque le match de son emprunte et permet à son équipe de l’emporter cinq buts à un. L’ailier marque deux fois et adresse trois passes décisives, étant donc impliqué sur les cinq buts de la rencontre.

Il réussit ensuite à emmener son équipe en finale de C1 en 1970, qui se soldera par une défaite face au Feyenoord Rotterdam, vainqueur non sans mal mais logiquement au vu de la physionomie du match. En 1972, le Celtic et Johnstone retrouvent l’Inter Milan en demi-finale de ligue des champions. Malheureusement, la chance ne sourit pas aux Hoops cette fois, malgré un Jimmy remuant sur son aile. Le Celtic ne réussit pas à faire sauter le verrou défensif des intéristes et s’incline aux tirs aux buts dans ce remake de la finale de 1967.

Deux ans plus tard, Johnstone mène à nouveau son club en demi-finale de C1, perdue cette fois contre l’Atlético de Madrid. Victime de tous types de tacles et autres fautes d’anti-jeu, un réel sentiment d’injustice se lira sur le visage de Johnstone au moment du coup de sifflet final.

La fin de l’aventure verte et blanche arrive le 10 juin 1975 pour Jinky. Ce dernier est dévasté, ne quittant pas seulement son club, mais aussi le coach qui a su l’enthousiasmer et le libérer sur un terrain de football, un coach qui le voyait comme son fils, et que lui voyait comme un père. Après cinq-cent-quinze matchs du côté de Glasgow, Jimmy fait ses valises et se lance dans une nouvelle aventure qui démarrera aux États-Unis.

Vie internationale et fin de carrière anonyme

Avant d’aborder sa fin de carrière, un mot sur sa carrière internationale. Pour ce qui est de sa carrière sur la scène internationale, et malgré sa renommée acquise grâce à ses exploits en club, elle est en deçà de son talent et de ses exploits à son actif. Il connaîtra vingt-trois sélections, un nombre vraiment modeste pour cet immense talent. Son faible nombre de sélection s’explique par sa phobie de l’avion, mais aussi quelques problèmes disciplinaires et des tensions entre le Celtic (qui est un club catholique aux racines irlandaises) avec la fédération écossaise. Mais pour ce personnage haut en couleurs et dont l’exploit est une habitude il aura son moment à lui en sélection. Au terme d’une soirée arrosée à Largs, ville où la sélection écossaise était basée pour préparer une rencontre contre l’Angleterre, il « emprunta » un canoë et partit à la dérive. Après intervention des garde-côtes, il est repris à temps avant de planter un doublé contre l’Angleterre quelques heures plus tard.

Jimmy Johnstone avec le maillot écossais, contre Michael Pejic lors du deuxième amical Ecosse-Angleterre en mai 1974

La puce tente le rêve américain pour tourner la page du Celtic. Mais l’aventure de l’autre côté de l’Atlantique se solde par un échec. Une dizaine de match à peine et le voilà déjà rentré sur le vieux continent, plus précisément du côté du Yorkshire. Deux petits buts en onze matchs seulement pour Sheffield United entre 1975 et 1977 plus tard, il rentre en Écosse pour tenter de redonner un nouveau souffle à sa carrière à Dundee United. Il y jouera seulement trois matchs en 1977 et ira ensuite tenter sa chance à Shelbourne, un club irlandais, pour la saison 1977-1978. Il y disputera neufs matchs et décide finalement de mettre fin à sa carrière à l’issue d’une ultime pige en Écosse, à Elgin City lors de la saison 1978-1979.

Sa carrière en club est somme toute formidable, en dépit des piges infructueuses de sa fin de carrière et d’une carrière internationale quelconque. Il essaiera d’embrasser la carrière d’entraîneur, mais celle-ci ne s’avère pas faite pour lui.

Profil d’une légende

En 2002, les supporters du Celtic Glasgow ont élu Jimmy Johnstone meilleur joueur de l’histoire du club. Une consécration qui en dit long sur l’aura entourant l’ailier et, bien que la plupart des votants ne l’aient jamais vu jouer, avec ses exploits, les vidéos de lui et les récits des anciens qui auront eu l’immense privilège de le voir à l’œuvre, tout concorde quant à la grandeur de sa légende. Une légende qui a eu droit à sa statue devant le stade du Celtic Glasgow, symbole d’un joueur, d’une équipe, d’exploits que personne n’oubliera peu importe le nombre de générations qui passent. Mais si le footballeur était génial, ses écarts de conduite lui coûteront cher comme cette cuite qui lui coûtera une place de titulaire au mondial 1974. A l’instar d’un certain Georges Best, il était connu pour être un alcoolique notoire et il lui arrivait souvent de se soûler en ville. Un goût pour la boisson qui n’a pas échappé à son coach Jock Stein, qui le faisait suivre pour le ramener chez lui ensuite. Son alcoolisme était surtout une échappatoire, un moyen d’assumer sa célébrité, mais sera malheureusement aussi ce qui le ruinera, avant qu’il reprenne sa vie en main.

Hommage posthume : la statue de Jimmy Johnstone devant le Celtic Park, inaugurée en décembre 2008

Jimmy Johnstone a marqué l’histoire du football. À une époque où le football professionnel devient de plus en plus élitiste et où les footballeurs sont toujours plus en marge de la société, il est bon de se remémorer ce Jinky qui se baladait en ville et saluait tout le monde. Il représente bien ces joueurs proches de leur environnement de vie, de leur quartier de naissance parfois, ces joueurs accessibles à tous. Jinky était de cette caste de joueurs qui ne supportaient pas la célébrité et qui était même plutôt introvertis : le football n’aura pas seulement été un amusement ou un moyen de s’émanciper de la vie de minier qui l’attendait, il aura été aussi le moyen pour lui de s’exprimer tout simplement. Sur un terrain, c’était ses dribbles intérieurs-extérieurs, ses contrôles de balle de la tête malgré sa petite taille (1m57), son jeu de corps, ses deux pieds aussi fantastiques l’un que l’autre, sa manière de semer la zizanie dans une défense, ses masterclass dans les grands matchs… Jimmy Johnstone rentre dans le débat des tous meilleurs joueurs de l’histoire du sport roi. Un profil semblable à Georges Best (sur les terrains et en dehors), les dribbles de Sir Stanley Matthews, le génie et l’art de rendre fou n’importe quel défenseur de Lionel Messi, Jinky est un savant mélange de ces trois hommes qui sont parmi les plus grands footballeurs et dribbleurs de tous les temps.

Un dribbleur hors-pair, motif d’espoir pour ceux qui l’ont vu jouer, un exemple d’ascension sociale et un battant, sur les terrains et en dehors après sa carrière. De Brian Clough à Sir Alex Ferguson, de Sir Bobby Charlton à Kenny Dalglish en passant par Dennis Law, les plus grands lui ont tiré son chapeau de son vivant. Le lion de Lisbonne était petit par la taille, grand par la bonté d’âme et immense par le talent. En 2001, il lui est diagnostiqué la maladie de Charcot, et Jimmy Johnstone s’éteint le 13 mars 2006 après cinq ans de combat contre la maladie. L’hommage de la planète foot sera à la hauteur de l’homme qu’il a été. Le dernier mot de ce long portrait revient aux supporters du Celtic qui, au moment de son décès, disent d’une seule voix : « Jinky, You’ll Never Walk Alone ».

Abdou lad

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